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Par Azalaïs le 15 Mars 2014 à 07:39
Marc-Aurèle Fortin (1888-1970)
« J'ai voulu créer une école du paysage canadien complètement détachée de l'école européenne. Il n'y a pas d'école typique canadienne où l'on ne sent aucune influence. J'ai été le premier à me dégager de cette emprise. »
Fortin a étudié à Montréal et à l´Art Institute of Chicago. Peintre de la nature, ses sujets préférés sont les arbres, d´énormes ormes feuillus frémissants de toute leur frondaison, accompagnés d'étonnants nuages qui traversent les cieux comme de puissants navires. Sous ces arbres, on trouve des charrettes de foins, des maisons rustiques, des personnages minuscules perdus dans cette nature luxuriante.
Très inventif, il expérimentera différentes techniques.
En 1918, il aborde l’aquarelle pure sur papier sec.
Entre 1929 et 1935, il voyage et expose beaucoup aux Etats-Unis, en Afrique du Sud, en France, en Italie
En 1936 il aborde la peinture à l´huile et il conçoit une technique qui consiste à peindre sur des fonds gris « pour décrire l'atmosphère chaude des ciels du Québec » et sur des fonds noirs pour « intensifier la relation entre l'ombre et la lumière ».
En 1939, il expérimente l’aquarelle rehaussée de crayon et de pastel gras ce qui ne s’était encore jamais vu.
Il s’adonne aussi à l’estampe et gravera près de 60 plaques.
En 1950, l'artiste découvre la caséine (détrempe à base de lait).
Mais bientôt, le destin frappe à sa porte en la personne d'Albert Archambault. Ce jeune homme de 25 ans, père de deux enfants est camionneur et vendeur. Fortin est diabétique et sa santé se dégrade. Il voit en ce vendeur itinérant l'homme providentiel qui va pouvoir l'aider.
Le 24 février 1955, le peintre se fait amputer la jambe gauche. La veille de l'opération, n'ayant personne d'autre à qui s'en remettre, Fortin signe devant notaire un acte de procuration au nom d'Albert Archambault faisant de celui-ci son fondé de pouvoir pour toutes ses affaires sans exception. À partir de ce moment, cet homme sera l'orchestrateur du drame que va devenir la vie de Marc-Aurèle Fortin pour les dix prochaines années.
Usant de béquilles, il apprend à se déplacer et à s'installer devant son chevalet. Quatre années plus tard, c'est l'amputation de l'autre jambe. Archambault, alcoolique criblé de dettes a pris, dès le début, l'habitude de vendre à des prix dérisoires des tableaux de Fortin à son insu.
Puis Fortin est exproprié de sa vieille maison de pierre au moment où l’on construisait l'autoroute des Laurentides. Archambault qui ne veut pas s’occuper du déménagement et de l'entreposage des œuvres les charge sur son camion et va déposer le tout au dépotoir. Après quoi, il y met le feu.Impotent, à la merci de cet homme, Fortin voit son oeuvre partir en fumée. S'il récrimine, Archambault menace de ne plus s'en occuper.
En 1964, la Galerie nationale du canada présente à Ottawa une exposition rétrospective de Marc-Aurèle Fortin qui circulera partout au Canada. Voilà le nom de l'artiste propulsé à l'avant-scène de l'activité culturelle. On s'interroge sur la situation de l'artiste que l'on sait toujours vivant, mais au sujet duquel des rumeurs courent de plus en plus. En cette année 64, les demandes de visites se font de plus en plus nombreuses mais Archambault refuse à tous l'accès au peintre.
À l'automne 66, le scandale éclate. Deux journalistes réussissent à franchir la porte d'Archambault en son absence. Ils interviewent et photographient Fortin, et le reportage paraît à la une du journal La Patrie. "Ce que je viens de voir est atroce!" lance d'emblée Louis-martin Tard. Et de décrire l'état abject dans lequel croupit le grand peintre, vieil homme de 78 ans au crâne rasé, vêtu d'une robe de chambre ouverte sur ce demi-corps devenu le sien. Tête de bagnard, barbe de plusieurs jours, l'oeil gauche à demi-fermé, presque aveugle, il gît dans des draps gris d'une saleté repoussante. René Buisson, collectionneur, fait 400 milles en auto pour sortir Fortin de cet enfer.
Les trois dernières années de sa vie se passeront dans la dignité au sanatorium de Macamic, en Abitibi.
À sa mort, à l´âge de 82 ans, il avait produit environ de huit à dix mille œuvres d´art, un grand nombre d´entre elles ayant été perdues .
Les liens vous mènent à la Fondation Marc-Aurèle Fortin pour celles et ceux qui voudraient en savoir plus sur les techniques du peintre.
D'autres oeuvres ici
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18 commentaires -
Par Azalaïs le 8 Mars 2014 à 08:58
J'ai perdu beaucoup de temps à rechercher de la documentation sur un artiste très discret dont j'aimerais bien vous parler. La semaine prochaine peut-être!
En attendant, je réédite ce poème écrit il y a fort longtemps sur ce paysage de Nicolas De Staël.
Horizons lointains
Au bord du noir
au bord de l'encre
au bord du vide
et de la nuit
sans étoile, sans mot,
une ville est posée
perdue dans un mirage.
Au milieu d'un silence
qui claque dans le vent
il a créé l'espace,
apprivoisé le blanc,
écrit au ciel et à la terre,
dessiné la frontière
de ce désert mouvant.
Et puis, dans un grand doute,
la mer,
comme un aplat de gris
une lame d'acier
longuement travaillée
au marteau de l'enclume
et qui hurle son rouge
quand elle force l'eau.
A peine trois couleurs,
au bout du paysage.
A peine trois couleurs
dans ce grand désert clos.
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Par Azalaïs le 1 Mars 2014 à 13:22
Aujourd’hui, je voulais vous faire découvrir un lieu peu connu et peu visité.
Il s’agit de la demeure d’enfance et de vacances du peintre Henri de Toulouse Lautrec : le château du Bosc.
Niché dans un écrin de verdure de la campagne aveyronnaise, il livre aux visiteurs un témoignage intact de son enfance et de sa passion pour le dessin et la peinture. La maison natale du peintre à Albi n’étant pas ouverte au public, le château du Bosc abrite les seuls souvenirs de famille visibles du peintre.
Après avoir tiré sur le cordon d’une cloche à l’ancienne vous aurez peut-être la chance d’être accueillis par Nicole Tapié de Céleyran, l’arrière petite cousine du peintre. Une rencontre unique qui donne à la visite un supplément d’âme ! Toujours très alerte malgré ses 89 ans, elle cultive toujours son potager et après avoir posé ses outils, changé de tenue, elle vous fera faire le tour du propriétaire, heureuse de raconter les anecdotes liées à tous les souvenirs, les objets qui se sont transmis de génération en génération.
Huit salles du château sont ouvertes à la visite. Une des plus émouvantes est le grand salon où naît sans doute le talent du peintre. « Il s’installait là le soir, à plat ventre sur le tapis pour dessiner et quand ses parents lui confisquaient ses crayons pour l’envoyer au lit, il volait un bout de charbon dans la cheminée pour terminer son ouvrage » raconte sa cousine avec beaucoup de tendresse pour cet enfant dont elle a tellement entendu parler.
Mais il y a surtout la chambre du jeune Henri avec les jouets et les dessins du peintre épars sur le sol, ses livres, un bateau de bois qu’il a sculpté lui-même, un théâtre de marionnettes avec lequel il aimait amuser son auditoire.
La visite s’achève par l’orangerie où l’on peut apprécier le coup de crayon de Toulouse Lautrec qui se plaisait à croquer directement sur le mur quelques caricatures de ses contemporains mais aussi son thème de prédilection : les chevaux et le cirque
Verlaine
Passez, si vous le souhaitez la première minute et vous aurez un aperçu de la visite
avec Madame Nicole Tapié de Céléran
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Par Azalaïs le 22 Février 2014 à 07:56
Chris Van Allsburg
Chris Van Allsburg est né en 1949 à Grand Rapids dans le Michigan, dans une famille de crémiers. Très jeune, il affirme un don certain pour le dessin et commence pourtant des études de droit à l'université du Michigan. On le retrouve aux beaux-arts et il obtient un diplôme de sculpteur de la Rhode Island School of Design. Il présente un jour son dossier à un éditeur de Boston. Quelques mois après, en 1979, paraîtra "Le Jardin d'Abdul Gasazi", son premier livre pour les enfants. Depuis, il est devenu un des plus grands illustrateurs de son époque et a reçu à deux reprises la Caldecott Medal, distinction la plus importante pour le livre de jeunesse aux Etats-Unis (pour "Jumanji" en 1982 et pour "Boréal Express" en 1986).
Sculpteur, peintre, il a exposé ses travaux dans des galeries et musées, notamment les célèbres MOMA et Whitney Museum. Professeur de faculté, il enseigne l'illustration à la Rhode Island School of Design. Ses livres dépeignent un univers étrange et mystérieux où la réalité se confond avec l'imaginaire dans des jeux subtils de lumière et de perspective.
"Mon objectif", dit Chris Van Allsburg, "est d'obliger le lecteur à réfléchir, et même à travailler, comme devant un puzzle ou une énigme. Mes histoires ne sont pas de celles où tout est dit et où, à la fin, tout s'éclaircit gentiment."
Aujourd’hui, je voulais vous parler de ce que je considère comme son coup de génie :
Les Mystères de Harris Burdick.
De quoi s'agit-il? De quatorze illustrations fantastiques et mystérieuses accompagnées simplement d’un titre énigmatique et d’une légende.
ÉCHEC À VENISE
« Cette fois-ci, elle était allée trop loin »
Pas d'histoire donc. Mais pourquoi ces illustrations sans texte portent-elles ce titre et qui est cet Harris Burdick? Eh bien d'après Chris Van Allsburg, il ne serait pas l'auteur véritable de ces dessins mais ils seraient d'un certain Harris Burdick qui les aurait déposés un jour chez un éditeur en lui disant qu'il lui emmènerait les textes plus tard si ces dessins lui plaisaient. Or, il n'est jamais revenu et personne ne sait ce qu'il est devenu. Vous y croyez vous?
UN JOUR ÉTRANGE DE JUILLET
« Il le lança de toutes ses forces,
Mais le troisième caillou revint en ricochant. »
Cependant, le plus grand mystère sans doute, c'est que depuis qu’ils sont parus, ces dessins ont fait parler, écrire et rêver des centaines d'enfants à travers le monde entier, mais aussi des adultes : écrivains, musiciens, publicistes, auteurs de théâtre, de dessins animés…
Ce bateau qui entre dans la ville ne vous fait-il pas penser à une publicité de parfum pour homme?
Il faut tout de même que je vous mette en garde, les dessins de Burdick/Van Allsburg ne sont pas totalement inoffensifs. Il y a par exemple celui de cet homme à l'expression absolument terrorisée, qui brandit une chaise au-dessus de sa tête pour se défendre de son tapis sous lequel se cache une créature non identifiée.
SOUS LA MOQUETTE
"Deux semaines passèrent et cela recommença".
Les citrouilles peuvent vous réserver quelques surprises
DESSERT VIVANT
« Elle abaissa le couteau et
cela devint encore plus lumineux »
Tout autant que les chenilles
OSCAR ET ALPHONSE
"Elle savait qu’il était temps de les renvoyer.
Les chenilles se tortillèrent doucement dans sa main
en lui disant au revoir"
Dans les univers explorés par Chris Van Allsburg, la loi de la pesanteur, si dure soit-elle, n'a pas cours. Le véhicule peut être une simple chaise, un train, ou une même une maison.
LES SEPT CHAISES
« La cinquième s’est arrêtée en France »
L'image suivante a inspiré une nouvelle à Stephen King: "La maison de Maple Street" .
LA MAISON DE LA RUE DES ÉRABLES
"Ce fut un beau décollage"
L’école des loisirs vient de publier "Les Chroniques de Harris Burdick", un recueil de nouvelles composées par quatorze auteurs, dont Stephen King, Lois Lowry, Louis Sachar, Lemony Snicket et Chris Van Allsburg. Chacun a imaginé, à partir d’une illustration de Harris Burdick, un texte dans lequel on retrouve l’étrange légende qui l’accompagne.
Contempler les dessins énigmatiques de Harris Burdick, c’est passer de l’autre côté du miroir, être aspiré dans un monde parfois lumineux, parfois angoissant, où tous les repères sont abolis. C’est être saisi de vertige et avoir le sentiment que la réalité ne sera plus jamais tout à fait la même. Tout comme avec Alice au pays des merveilles on peut passer par la petite porte.
DES INVITES INATTENDUS
« Son cœur battait très fort.
Il était certain d’avoir vu le bouton de la porte tourner. »
Et maintenant qu’attendez-vous pour partir à l’aventure ? Prenez votre crayon, votre stylo, votre appareil photo, votre flûtiau…. et embarquez sans crainte à bord de votre draisine à voile, votre luge à pédales, votre vélo à vapeur, dans « l’attelage d’un autre âge » comme le disait Henry Michaux
AUTRE LIEU, AUTRE TEMPS
« S’il y avait une réponse, c’est là qu’il la trouverait »
CAPITAINE TORY
« Il balança sa lanterne trois fois et la goélette apparut lentement. »
Toutefois, laissez-moi vous donner un conseil ! Ne vous endormez jamais en laissant votre fenêtre ouverte et surtout, prenez soin de bien refermer votre livre de chevet avant de vous endormir. Qui sait ce qui peut arriver ?
LA CHAMBRE DU SECOND
« Tout a commencé quand quelqu’un a laissé
la fenêtre ouverte »
ARCHIE SMITH, LE PRODIGE
Une petite voix demanda : « Est-ce que c’est lui ? »
LA BIBLIOTHÈQUE DE M. LINDEN
« Il l’avait prévenue pour le livre.
Maintenant, il était trop tard. »
C’était Azalaïs qui vous parlait en direct des cascades de Mortain où elle a enfin retrouvé la harpe magique de Merlin.
LA HARPE
« C’est donc vrai, pensa-t-il, c’est absolument vrai. »
Si vous souhaitez les voir en grand, elles sont là
Sources: L'école des Loisirs
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Par Azalaïs le 15 Février 2014 à 08:52
Sir Edward Burne-Jones, peintre anglais né à Birmingham en 1833, décédé à Londres en 1898
"On associe encore, presque un siècle après sa mort, le nom de Burne-Jones à l’œuvre des préraphaélites, bien qu’il rejoignît relativement tard ce groupe et qu’il en dépassât les aspirations à bien des égards. Il fut considéré comme le chef de file du mouvement esthétique, le précurseur du symbolisme et l'une des figures majeures du XIX ème siècle.
Ses tableaux, et spécialement ceux de la dernière partie de sa carrière longue de quarante ans, possèdent une réelle part de rêve, de mystère et d’immatérialité. Sa vie artistique fut constituée d’éléments majeurs : la recherche ininterrompue de la beauté, une obsession de la lutte entre le bien et le mal, le goût de la chevalerie et de l’amour courtois tous étroitement mêlés aux idéaux de la grande période victorienne."
Russel Ash
Allergique à l’odeur de la térébenthine, il utilisait l’aquarelle en couches épaisses à laquelle il mélangeait d’autres matières comme l’or pour créer des surfaces à l’aspect de bijoux précieux.
Parmi mes tableaux préférés je vous propose aujourd’hui la série des « Six jours de la création » appelés aussi "Les anges de la création". Elle était à l’origine une série de dessins destinés à une commande de vitraux pour une église de Tamworth.
Chaque jour successif comprend un nombre d’anges lui correspondant. Dans chacun, l’ange qui se tient au premier plan tient une boule dans laquelle figurent les évènements décrits par la Genèse pour son jour. On voit ainsi la création progressive de l’univers étape par étape, les anges reculant au fur et à mesure pour céder leur place.
J'aime tout particulièrement la façon dont le peintre a traité les plumes des anges, de véritables bijoux dont les couleurs évoluent du gris aux couleurs de l'arc en ciel mais aussi la paix et la douceur qui émanent des visages.
le premier jour
le second jour
le troisième jour
Je n’ai pas réussi à recopier l'ange du quatrième jour,
vous le retrouverez à l'arrière du cinquième ange.
J’avais écrit il y a quelques années un texte sur ce cinquième ange, le voici
Éveil
La nuit des origines
A rompu les amarres.
Voici le flot, voici la vague,
Voici le fleuve et l’océan.
Un tourbillon d’oiseaux
A fleuri sur les eaux.
Au loin flotte un soleil
Répandu, immobile.
Attente…
Ouvrir les portes du sommeil
Dans le jour qui se lève,
Chercher les mots,
Trouver la source,
Habiller le silence.
Le sixième et le septième ange.
Ce dernier est représenté assis en train de jouer d'un instrument à cordes
puisque le septième jour
Dieu se reposa.
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