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La marguerite des plus possibles
Ce texte a été écrit en atelier avec deux mots imposés: "bouquet et savoir-faire"
Je demande pardon à celles qui aiment les bouquets.
J’ai toujours détesté les bouquets, cet ensemble de fleurs coupées que l’on met à faner dans une eau pourrissante où elles effeuillent, le cœur lourd, la marguerite des plus possibles. Je n’aime pas non plus la fierté de ces dames patronnesses heureuses et fières de vous montrer leur savoir-faire, leur don d’artistes assassines, la façon dont elles savent associer la couleur des corolles, la hauteur des tiges à l’élégance du vase.
Pauvres, pauvres fleurs, innocentes, sauvages, offertes aux soins qu’elles attendent de vous et tellement heureuses d’accueillir tous les jours les surprises du vent, la caresse d’un rayon de soleil, la tiédeur d’une pluie de printemps. Pensez-vous vraiment qu’elles soient heureuses de faire trempette dans votre vase ancien, serrées à en vomir sur la table de votre salle-à-manger rustique ?
Moi, mes fleurs, je vais les visiter tous les matins dans mon petit jardin. Je frôle d’un doigt leur peau veloutée et soyeuse, je m’essaie vainement à décrypter la fugacité de leur parfum, je leur soulève tendrement le menton pour leur dire bonjour, j’en observe le cœur ébouriffé de jaune après l’ardent remue-ménage d’une abeille, je leur invente des poèmes, des comptines, des berceuses, j’en fais les héroïnes d’histoires fabuleuses et surtout, je n’oublie jamais de leur dire merci, des brassées, des gerbes, des bottes, des bouquets de mercis.
Pensez-vous que l’on puisse dire merci avec un sécateur à la main ? « Clac clac, et une de moins ! » Plutôt que de scander ce petit air barbare je préfère de beaucoup entremêler leurs noms pour en faire un cortège de sons aussi légers à dire qu’un vol de papillon :
« Capucine, ancolie, hellébore, zinnia »
Le chuchoter les yeux fermés, prendre congé du monde qui m’entoure, fermer la porte aux carnages vociférants des hommes, m’abandonner à cette joie naïve qui se faufile en moi, me traverse, m’inonde, déverse ses bienfaits, me relie au ciel et à la terre par des milliers de connections secrètes :
« Alchémille, achillée, asphodèle, lilas »
En tresser des guirlandes, reliant les saisons :
« Nigelle, giroflée, santoline, dahlia »
Et quand je les regarde elles savent bien mes fleurs l’amour que je leur porte. Alors elles font les belles dans l’air frivole du printemps, elles prennent des poses alanguies, étalant leurs pétales sous les doigts du soleil, elles s’inclinent avec grâce dans l’oranger des soirs d’automne, elles me confient leurs peines courbant tragiquement la tête quand sonne l’heure des dernières vendanges. Et moi je suis emplie toujours d’une tendresse immense, troublante, comme quand je regarde un tout petit enfant.
« Passerose, pensée, pervenche, réséda »
Un petit coucou à Quichottine qui se démène sans compter pour notre "Marguerite des possibles"
Tags : fleurs, bouquets, jardins, écriture en atelier
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Commentaires
bonjour, mon Aza,
d'abord, la Newsletter a fonctionné !
et puis et surtout, comme j'ai adoré ta Rose Trémière, j'adore ce nouveau texte !
ils se complètent tellement !
je sais bien que c'est un exercice de stylemais je suis profondément d'accord avec l'idée : je déteste les bouquets, les fleurs coupées ou séchées !!!
et même les imitations en plastoc
et toc !
de grâce, laissez les cadavres de fleurs martyrisées aux pauvres morts des cimetières !
oui je sais les Japonais en ont fait un Art, l'Ikebana, je crois...
grand bien leur fasse !
on parle aussi d'art funéraire !...
excuse ma véhémence, mon Aza !
tu me connais... pas de demi-mesures...bonne journée
gros bisous d'amitié
jean-marieGrâce à toi Jean-Marie, j'ai enfin compris comment ça marche!
Ce n'est pas qu'un exercice de style, je déteste réellement faire des bouquets avec les fleurs de mon jardin. Je ne peux pas m'y résoudre et au cimetière, j'emmène des plantes grasses, des pommes de pin, des amour en cage, de la monnaie du pape qui de toute façon se dégradent quand ils ne sont pas coupés
Je suis heureuse d'avoir trouvé un allié!
bises
Comme elle est jolie ta guirlande de fleurs sauvages Azalaïs.... C'est un plaisir de te retrouver avec ce bouquet virtuel. Celui-là ne fanera pas, c'est sûr.
Je te fais de gros bisous et te dis un grand merci pour ta visite sur mon blog. Je viens de m'inscrire à ta newsletter, j'espère que ça va fonctionner...
Je lis pour la seconde fois, et avec un plaisir inchangé.
Ton texte est très beau, sensuel, tendre... et je comprends tout à fait que tu n'aimes pas les bouquets.
Je ne peux pas dire que je ne les aime pas... j'ai vécu longtemps en ville et je n'ai pas la main verte... ce qui fait que les plantes ne résistaient pas longtemps, qu'elles soient fleuries ou non. Alors, je laissais mon époux m'offrir de quoi égayer ma table : une rose, des œillets, une branche de mimosa, ou, souvent, ces "chrysanthèmes" qu'on appelle "Tokio" pour en vendre plus longtemps qu'à la Toussaint.
Un bouquet, une fleur, c'était comme un rayon de soleil dans notre grisaille de banlieue.
Alors, c'est vrai, celles du jardin sont plus jolies, vivent plus longtemps, et j'ai moins de bouquets chez moi maintenant.
Un carré de verdure parsemé de pâquerettes, un hortensia, trois rosiers, et un petit coin d'herbes folles pour les papillons et les abeilles... parfois, d'autres fleurs qui s'épanouissent au gré des saisons, du soleil ou de la pluie, qui me sourient lorsque je vais leur rendre visite.
Ceci étant... je crois que je ne regarderai plus jamais les fleurs sans penser à toi. :)
Passe une douce soirée. Merci pour ce coucou qui me fait grand plaisir.
Je t'embrasse.
merci Oxygène, c'est gentil, j'espère pouvoir continuer à publier m^me si c'est de temps en temps
je t'embrasse
c'est vrai que c'est beau un grand bouquet de fleurs,
j'aime bien regarder les reportages sur les châteaux avec ces énormes bouquets dans chaque pièces, je les trouve magnifiques mais quel travail et ça dure si peu!
bises
Toujours le sourire lorsque l'on m'offre un bouquet, mais perso, je les regarde , les touche, les hume et ne veux pas les cueillir . Les marguerites sont celles qui durent les plus longtemps dans l'eau, mais elles ont une odeur particulière qui demande à renouveler l'eau ... La seule que j'admire reste la rose, qui d'une manière ou d'une autre, a la vie bien courte ..
Bisous Aza, toujours des jolis mots ( la NL ne fonctionne pas )
merci de ta visite Liliane, je ne comprends pas pour la NL, elle a fonctionné avec d'autres peut-être dois-je encore faire quelque chose que je ne maîtrise pas?
C'est vrai que les roses sont très belles dans un vase. Cet été, j'ai dû couper beaucoup de mes Pierre de Ronsard à cause de la pluie qui alourdissait les branches et qui en a cassé une. je les mariais avec des nigelles, l'effet était superbe mais cela me brisait le coeur
bises
16mpollyDimanche 28 Juillet 2013 à 08:37Je préfère comme toi les fleurs dans le jardin, et plus encore dans les champs avant que les coupeurs de foin n'interviennent. Je dis gentiment merci si on m'offre un bouquet mais je le regarde toujours un peu de travers, souvent il vient d'Afrique dans ces plantations indiennes ou chinoises qui font tant de mal aux agriculteurs locaux. Ce côté des choses me met en colère.
Comme toi, je récupère la tige coupée par la grêle ou le vent, mais cette année je n'ai guère pris soin ni du potager ni des massifs, elles refusent de fleurir (je crois que les limaces y sont pour beaucoup).
Ton texte chante la beauté de leurs corolles, leurs couleurs, dans ce matin de grand vent fou, il met du frais et du calme.
Bon dimanche et bisous bisous.
bonjour, mon Aza,
excuse-moi de revenir sur la question de la Newsletter : je ne pense pas que tu aies fait d'erreur mais pour recevoir ta NL il faut que les visiteurs s'y inscrivent lors du passage sur ton blog avec leur adresse mailcontent que tu aies apprécié mon peintre québecois
bon dimanche à toi
gros bisous d'amitié
jean-mariemerci Jean-Marie
j'espère que vous n'avez pas eu de gros orages ce week-end. Nous avons dû quelque peu écoper dans notre véranda, par chance la pluie est devenue moins violente sinon le bas de la maison était inondée.
bises et bonne semaine
Ne t'excuse pas, j'aime les fleurs dans leur cadre naturel, comme j'aime le plaisir au petit matin, seule dans mon jardin, de couper quelques fleurs qui embelliront ma maison et l'embaumeront d'un doux parfum champêtre...
Je partage aussi cet amour des fleurs "libres" de continuer leur vie de fleurs là où elles poussent...
Si j'avais ton talent je les peindrais aussi, je m'y suis essayée mais l'aquarelle est un art tellement difficile
Tu peins si bien avec des mots et sais ainsi glorifier la beauté du rencontré.
une bien belle rencontre en ce jour.
L'aquarelle est en effet difficile mais c'est magique et cela répond à ma quête de poésie pour raconter et dire autrement surtout avec la technique du mouillé sur mouillé.
comment ne pas les préférer dans la nature avec le ciel, le vent et les insectes dessus
merci de ta visite jackie
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Que j'aime entendre chanter ta comptine des fleurs, vivantes !
Aubade, berceuse, romance, ... c'est beau !
Merci Azalaïs, merci pour elles.
Je t'envoie une brassée de bisous.