• Chris Van Allsburg

     

    Chris Van Allsburg Image

     

    Chris Van Allsburg est né en 1949 à Grand Rapids dans le Michigan, dans une famille de crémiers. Très jeune, il affirme un don certain pour le dessin et commence pourtant des études de droit à l'université du Michigan. On le retrouve aux beaux-arts et il obtient un diplôme de sculpteur de la Rhode Island School of Design. Il présente un jour son dossier à un éditeur de Boston. Quelques mois après, en 1979, paraîtra "Le Jardin d'Abdul Gasazi", son premier livre pour les enfants. Depuis, il est devenu un des plus grands illustrateurs de son époque  et a reçu à deux reprises la Caldecott Medal, distinction la plus importante pour le livre de jeunesse aux Etats-Unis (pour "Jumanji" en 1982 et pour "Boréal Express" en 1986).

    Sculpteur, peintre, il a exposé ses travaux dans des galeries et musées, notamment les célèbres MOMA et Whitney Museum. Professeur de faculté, il enseigne l'illustration à la Rhode Island School of Design. Ses livres dépeignent  un univers étrange et mystérieux  où la réalité se confond avec l'imaginaire dans des jeux subtils de lumière et de perspective.

    "Mon objectif", dit Chris Van Allsburg, "est d'obliger le lecteur à réfléchir, et même à travailler, comme devant un puzzle ou une énigme. Mes histoires ne sont pas de celles où tout est dit et où, à la fin, tout s'éclaircit gentiment."


     

    Aujourd’hui, je voulais vous parler de ce que je considère comme son coup de génie :

    Les Mystères de Harris Burdick.

    De quoi s'agit-il? De  quatorze illustrations fantastiques et mystérieuses accompagnées simplement d’un titre énigmatique et d’une légende.

     


     ÉCHEC À VENISE
     

     « Cette fois-ci, elle était allée trop loin »

     

    Pas d'histoire donc. Mais pourquoi ces illustrations sans texte portent-elles ce titre et qui est cet Harris Burdick? Eh bien d'après Chris Van Allsburg, il ne serait pas l'auteur véritable de ces dessins mais ils seraient d'un certain Harris Burdick qui les aurait déposés un jour chez un éditeur en lui disant qu'il lui emmènerait les textes plus tard si ces dessins lui plaisaient. Or, il n'est jamais revenu et personne ne sait ce qu'il est devenu. Vous y croyez vous?  

     

    UN JOUR ÉTRANGE DE JUILLET

     « Il le lança de toutes ses forces,

    Mais le troisième caillou revint en ricochant. »

     

    Cependant, le plus grand mystère sans doute, c'est que depuis qu’ils sont parus, ces dessins ont fait parler, écrire et rêver des centaines d'enfants à travers le monde entier, mais aussi des adultes : écrivains, musiciens, publicistes, auteurs de théâtre, de dessins animés…

    "Les Mystères de Harris Burdick", de Chris Van Allsburg © l'école des loisirs

    « Les Mystères de Harris Burdick »,
    de Chris Van Allsburg © l’école des loisirs

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    Concours d’écriture Harris Burdick

    Ce bateau qui entre dans la ville ne vous fait-il pas penser à une publicité de parfum pour homme?

     

    Il faut tout de même que je vous mette en garde, les dessins de Burdick/Van Allsburg ne sont pas totalement inoffensifs. Il y a par exemple celui de cet homme à l'expression absolument terrorisée, qui brandit une chaise au-dessus de sa tête pour se défendre de son tapis sous lequel se cache une créature non identifiée.

     

    SOUS LA MOQUETTE 

    "Deux semaines passèrent et cela recommença". 

     

    Les citrouilles peuvent vous réserver quelques surprises



    DESSERT VIVANT

    « Elle abaissa le couteau et

    cela devint encore plus lumineux »

     

    Tout autant que les chenilles

    OSCAR ET ALPHONSE

    "Elle savait qu’il était temps de les renvoyer.

    Les chenilles se tortillèrent doucement dans sa main

    en lui disant au revoir" 

     

    Dans les univers explorés par Chris Van Allsburg, la loi de la pesanteur, si dure soit-elle, n'a pas cours. Le véhicule peut être une simple chaise, un train, ou une même une maison.

     


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    LES SEPT CHAISES

    « La cinquième s’est arrêtée en France »

     

    L'image suivante a inspiré une nouvelle à Stephen King: "La maison de Maple Street" .  

     

     LA MAISON DE LA RUE DES ÉRABLES  

       "Ce fut un beau décollage"  

     

    L’école des loisirs vient de publier "Les Chroniques de Harris Burdick", un recueil de nouvelles composées par quatorze auteurs, dont Stephen King, Lois Lowry, Louis Sachar, Lemony Snicket et Chris Van Allsburg. Chacun a imaginé, à partir d’une illustration de Harris Burdick, un texte dans lequel on retrouve l’étrange légende qui l’accompagne.  

      

    Contempler les dessins énigmatiques de Harris Burdick, c’est passer de l’autre côté du miroir, être aspiré dans un monde parfois lumineux, parfois angoissant, où tous les repères sont abolis. C’est être saisi de vertige et avoir le sentiment que la réalité ne sera plus jamais tout à fait la même. Tout comme avec Alice au pays des merveilles on peut passer par la petite porte.

    clic sur l'image

      DES INVITES INATTENDUS

    « Son cœur battait très fort.

    Il était certain d’avoir vu le bouton de la porte tourner. » 

     

     Et maintenant qu’attendez-vous pour partir à l’aventure ? Prenez votre crayon, votre stylo, votre appareil photo, votre flûtiau…. et embarquez  sans crainte à bord de votre draisine à voile, votre luge à pédales, votre vélo à vapeur, dans « l’attelage d’un autre âge » comme le disait  Henry Michaux

    AUTRE LIEU, AUTRE TEMPS

    « S’il y avait une réponse, c’est là qu’il la trouverait »

     

    CAPITAINE TORY - Il balança sa lanterne trois fois et la goélette apparut lentement.

    CAPITAINE TORY

    « Il balança sa lanterne trois fois et la goélette apparut lentement. »

     

    Toutefois, laissez-moi vous donner un conseil ! Ne vous endormez jamais en laissant votre fenêtre ouverte et surtout, prenez  soin de bien refermer votre livre de chevet avant de vous endormir. Qui sait ce qui peut arriver ?

     

    MysteriesHarrisBurdick4 Top 100 Picture Books #50: The Mysteries of Harris Burdick by Chris Van Allsburg

     

    LA CHAMBRE DU SECOND

    « Tout a commencé quand quelqu’un a laissé

    la fenêtre ouverte »

     

     

    ARCHIE SMITH, LE PRODIGE

    Une petite voix demanda : « Est-ce que c’est lui ? »

     

     

    LA BIBLIOTHÈQUE DE M. LINDEN

    « Il l’avait prévenue pour le livre.

    Maintenant, il était trop tard. »

     

    C’était Azalaïs qui vous parlait en direct des cascades de Mortain où elle a enfin retrouvé la harpe magique de Merlin.

     

     LA HARPE - C'est donc vrai, pensa-t-il, c'est absolument vrai.

    LA HARPE

     « C’est donc vrai, pensa-t-il, c’est absolument vrai. »

     

     Si vous souhaitez les voir en grand, elles sont

     

    Sources: L'école des Loisirs  

     Le blog de psychovision

     

    Avec Jean-Baptiste Camille Corot "Dans la lumière du Nord"

     

     

     


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    Alfred Kubin

     

     

    -         Vraiment Messire ? C’est que par ici, nous sommes gâtés lâcha-t-il à l’étourdi ! Il y a l’histoire de la Grotte des Sarrasins, celle du Pas du Diable qui raconte la bataille entre le Diable et l’Archange Saint Michel, celle des corbeaux de la cascade et puis la légende de la Fosse Arthour…

    Ainsi nous n’étions pas loin de Mortain et la cloche que j’avais entendue tout à l’heure était peut-être celle de l’Abbaye Blanche. Il me fallait avancer un nouveau pion.

    -         De très belles légendes c’est vrai. J’aime beaucoup celle du roi Arthur et de la reine Guenièvre prisonniers à jamais dans leur grotte derrière les cascades. Mais sais-tu que parfois l’enchanteur Merlin a le pouvoir de les libérer  en jouant de sa harpe magique ?

    -         Une harpe magique ?

    -         Oui, c’est une harpe que l’on peut voir parfois sur une pierre plate tout près de la cascade. De plus elle exauce dit-on les vœux de ceux qui ont la chance de l’apercevoir.

    Les yeux de l’enfant se mirent à briller comme des agates.

    -         Et connaissez-vous l’emplacement de cette pierre plate ?

    -         Pour sûr mon garçon que je le connais !

    -         Pourriez-vous m’y mener ?

    -    Eh bien…. il faudrait pour cela que nous ne soyons pas trop loin de Mortain. Je crois que nous n’allons pas tarder à repartir et je ne voudrais pas faire attendre mes compagnons.

    Il me sourit alors avec tristesse et dit dans un murmure :

    -     Ne vous tracassez donc pas pour cela Messire, on vous attendra. Il faut seulement que nous sortions d’ici sans nous faire remarquer. Le Polyte n’aime pas me voir traîner sur les routes et m’a ordonné de rester ici. Tenez, le voilà qui va dans la souillarde, profitons-en, vite suivez moi.

    Il me désigna alors une porte dérobée astucieusement dissimulée derrière la cheminée. Elle menait directement à une écurie fort sombre dans laquelle se tenaient trois chevaux tout harnachés. Leurs sabots étaient entourés de chiffons sans doute pour étouffer le bruit de leurs pas. Ces malandrins pensaient vraiment à tout ! Sans faire le moindre bruit il sortit un grand hongre roux que nous enfourchâmes tous deux puis il me guida de façon magistrale vers Mortain en empruntant quantité de sentiers détournés à travers bois, landes et prairies. Malgré la peur et l’excitation qui ne cessaient de grandir en moi, j’admirais l’habileté de cet enfant, sa grâce, son ingéniosité et remerciais le ciel d’avoir préservé sa naïveté. Mais je pensais aussi à mes compagnons lâchement abandonnés et tentais de garder en mémoire tous les indices de la route qui me permettraient de retrouver cette auberge maudite.

    Quand nous fûmes enfin à l’entrée de la gorge, je lui dis qu’il fallait s’enfoncer un peu dans les bois tout en suivant la Cance. C’était une journée de printemps magnifique et tout autour de nous, de petites feuilles se déployaient tendrement dans une débauche de verts. Mais moi, je ne voyais rien. Il me fallait à tout prix trouver une pierre plate. Bien sûr, j’aurais pu laisser là le pauvre enfant et repartir à bride abattue vers Mortain mais je voulais récupérer en douceur ma chère statuette.

    Soudain, je vis de l’autre côté de la rivière ce que je cherchais: une très belle dalle de granit verdâtre au-dessus de laquelle deux grands arbres inondés de lumière faisaient comme une arche protectrice. Je demandai au garçon de descendre du cheval et de se tenir à distance, dissimulé derrière un rocher pendant que je prononcerais la formule magique censée faire apparaître la harpe. Je me mis alors à bredouiller une sorte de litanie en latin de cuisine puis me frappai le front comme pris d’une inspiration subite !

    -         Mais que je suis donc sot, cela ne peut fonctionner que si je tiens dans ma main une statuette de l’Archange pour écarter les forces maléfiques et voilà que je l’ai oubliée chez moi ! Comment faire ?

    Bien entendu le pauvre enfant me dit ingénument qu’il en avait une et me la tendit avec un pauvre petit sourire plein de honte. Une fois la précieuse statuette dans ma poche, je recommençai à dire la fausse litanie et tout en invitant le garçon à la réciter avec moi, je fis faire demi-tour à mon cheval et partis  au grand galop vers Mortain où j’informai aussitôt les gendarmes de ma mésaventure en les priant de faire au plus vite pour tenter de retrouver vivants mes malheureux compagnons.

    Trois jours plus tard on put lire dans la Gazette comment grâce au très célèbre Aristide Maupin une bande de dangereux brigands qui écumaient depuis quelques temps toute la région avait été arrêtée. Par chance aucun de mes compagnons n’était mort. On les retrouva ligotés dans une grange où les malfrats leur avait un peu chauffé les pieds pour les forcer à révéler leurs adresses respectives et surtout où ils cachaient leurs pièces d’or.

    Quant à moi, je cessai de courir la campagne à la recherche de toutes ces créatures du Diable. J’avais eu trop peur. À trop courir après le Mal on finit par le trouver. Aussi m’étais-je reconverti en chroniqueur artistique. Désormais je ne recherchai plus que les jolies choses, celles qui apportent la paix aux âmes et je visitai pour mes lecteurs les plus beaux sites de la planète.

    Pendant longtemps, le beau visage de l’enfant blond que j’avais abandonné tout près de la cascade me hanta. Je n’avais pas parlé de lui aux gendarmes. En m’attribuant à moi seul le succès de mon évasion, j’avais voulu le protéger mais qu’était-il devenu alors que toute la bande avait été arrêtée. Plusieurs fois j’étais revenu au pied de la cascade espérant le retrouver mais bien sûr, je n’y trouvai personne.

    Ce n’est qu’au soir de ma vie, alors que je me rendais sans doute pour la dernière fois à l’abbaye de Mortain que j’eus le fin mot de l’histoire. Je ne sais quel obscur pressentiment me poussa à demander un prêtre pour confesser ce qui me hantait depuis si longtemps et que je n’avais jamais osé avouer à personne. On me dépêcha un moine dont je ne vis pas le visage car il était dissimulé par une grande capuche blanche. Il m’invita à m’asseoir à ses côtés et il écouta toute ma confession sans dire un seul mot. À la fin, il se leva, me prit les mains et me dit moitié riant, moitié pleurant :

    -         Ne soyez plus triste mon frère car vous m’avez sauvé la vie. Après votre départ, je vous en ai voulu naturellement mais plutôt que de chercher à retrouver le Polyte et sa bande qui me faisaient très peur, je me suis dirigé vers l’abbaye. Là, après avoir conté mon histoire, les moines m’accueillirent comme si j’étais leur propre enfant. Ils m’éduquèrent et bien qu’ils m’aient laissé libre de mes choix, je n’en suis jamais reparti. Vous voyez, la harpe de Merlin a réalisé mon vœu, celui de me trouver une vraie famille car tout comme Oliver Twist, je n’étais qu’un orphelin recueilli par une bande de malfrats qui m’obligeaient à commettre des actions qui me répugnaient.

    -         La harpe de Merlin, m’écriai-je !  Elle existe donc ?

    -         Mais naturellement qu’elle existe mon frère, en douteriez-vous ?

     

    FIN

    LA HARPE - C'est donc vrai, pensa-t-il, c'est absolument vrai.

    Chris Van Allsburg


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    Sir Edward Burne-Jones, peintre anglais né à Birmingham en 1833, décédé à Londres en 1898

     


    "On associe encore, presque un siècle après sa mort, le nom de Burne-Jones à l’œuvre des préraphaélites, bien qu’il rejoignît relativement tard ce groupe et qu’il en dépassât les aspirations à bien des égards. Il fut considéré comme le chef de file du mouvement esthétique, le précurseur du symbolisme et l'une des figures majeures du XIX ème siècle.

    Ses tableaux, et spécialement ceux de la dernière partie de sa carrière longue de quarante ans, possèdent une réelle part de rêve, de mystère et d’immatérialité. Sa vie artistique fut constituée d’éléments majeurs : la recherche ininterrompue de la beauté, une obsession de la  lutte entre le bien et le mal, le goût de la chevalerie et de l’amour courtois tous étroitement mêlés aux idéaux de la grande période victorienne."

    Russel Ash

     Allergique à l’odeur de la térébenthine, il utilisait l’aquarelle en couches épaisses à laquelle il mélangeait d’autres matières comme l’or pour créer des surfaces à l’aspect de bijoux précieux.  

    Parmi mes tableaux préférés je vous propose aujourd’hui la série des « Six jours de la création » appelés aussi  "Les anges de la création". Elle était à l’origine une série de dessins destinés à une commande de vitraux pour une église de Tamworth.

    Angels of Creation - Edward Burne-Jones

    Chaque jour successif comprend un nombre d’anges lui correspondant. Dans chacun, l’ange qui se tient au premier plan tient une boule dans laquelle figurent les évènements décrits par la Genèse pour son jour. On voit ainsi la création progressive de l’univers étape par étape, les anges reculant au fur et à mesure pour céder leur place.

     J'aime tout particulièrement la façon dont le peintre a traité les plumes des anges, de véritables bijoux dont les couleurs évoluent du gris aux couleurs de l'arc en ciel mais aussi la paix et la douceur qui émanent des visages.

     

    File:BURNE-Jones, Edward Days of Creation (First) 1870-1876.jpg

     le premier jour

     

    File:BURNE-Jones, Edward Days of Creation (Second) 1870-1876.jpg

     le second jour

        

    File:BURNE-Jones, Edward Days of Creation (Third) 1870-1876.jpg

    le troisième jour

     

    File:BURNE-Jones, Edward Days of Creation (Fifth) 1870-1876.jpg

     Je n’ai pas réussi à recopier l'ange du quatrième jour,

    vous le retrouverez à l'arrière du cinquième ange.

    J’avais écrit il y a quelques années un texte sur ce cinquième ange, le voici

     

    Éveil

     

    La nuit des origines

    A rompu les amarres.

    Voici le flot, voici la vague,

    Voici le fleuve et l’océan.

    Un tourbillon d’oiseaux

    A fleuri sur les eaux.

    Au loin flotte un soleil

    Répandu, immobile.

    Attente…

    Ouvrir les portes du sommeil

    Dans le jour qui se lève,

    Chercher les mots,

    Trouver la source,

    Habiller le silence.

     

    Edward Burne-Jones (Edward Burne Jones)

    Le sixième et le septième ange.

    Ce dernier est représenté assis en train de jouer d'un instrument à cordes

      puisque le septième jour  

    Dieu se reposa.

    Avec Tina O, la découverte d'une oeuvre, d'un talent...

     

     

     


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  • En rendant visite à Martine, j'ai relu avec plaisir cette poésie de Rosemonde Gérard:

    "L'éternelle rengaine" mais j'ai surtout aimé sa photo montrant deux retraités au bord du flot qui passe.

    Cela m'a fait penser à un poème de Sully Prudhomme mis en musique par Gabriel Fauré, poème qui m'émeut tout particulièrement et que je dédie à tous les vieux amoureux, ceux qui résistent et qui savent affronter main dans la main tous les périls d'une longue, longue vie de couple.

     

     

    Au bord de l'eau

     

    S'asseoir tous deux au bord d'un flot qui passe,
    Le voir passer

    Tous deux, s'il glisse un nuage en l'espace,
    Le voir glisser

    A l'horizon, s'il fume un toit de chaume,
    Le voir fumer

    Aux alentours, si quelque fleur embaume,
    S'en embaumer

    Si quelque fruit, où les abeilles goûtent,
    Tente, y goûter

    Si quelque oiseau, dans les bois qui l'écoutent,
    Chante, écouter...

    Entendre au pied du saule où l'eau murmure
    L'eau murmurer

    Ne pas sentir, tant que ce rêve dure,
    Le temps durer

    Mais n'apportant de passion profonde
    Qu'à s'adorer

    Sans nul souci des querelles du monde,
    Les ignorer

    Et seuls, heureux devant tout ce qui lasse,
    Sans se lasser


     


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  •  Pour La petite fabrique d'écriture

    Vous trouverez les deux premiers épisodes ici et  et veuillez me pardonner de m'être lancée dans une aventure aussi longue mais on ne choisit pas  toujours. La fin de l'histoire est pour la prochaine fois.

     

    Rembrandt

     

    Au loin, dans le rouge sanglant du jour qui sortait de ses brumes, un chœur de cloches joyeuses tinta et je reconnus l’appel de l’angélus. Nous étions proches d’un village, d’un monastère peut-être. Dans ce cas pourquoi notre cocher n’avait-il pas poursuivi sa route plutôt que de nous contraindre à attendre dans ce sinistre bourbier ? Sans doute voulait-il faire profiter son cousin de quelques pièces. J’entrais donc comme on entre dans un rêve malsain. Quelque chose me disait de m’enfuir mais mes jambes étaient nouées par quelque malédiction dont je ne savais rien.

    La pièce dans laquelle nous entrâmes nous surprit tous agréablement. Elle était spacieuse, propre et bien tenue. Quelques chandeliers d’argent l’éclairaient suffisamment pour que nous puissions apprécier le luisant des meubles. Sur  les murs blanchis à la chaux des cuivres brillaient doucement se renvoyant toute une mosaïque de couleurs chatoyantes. Aux fenêtres, de pimpants rideaux de dentelle apportaient une note de fraîcheur champêtre. Près de la cheminée, une vieille femme somnolait dans un fauteuil à oreillettes. Ses épaules étaient entourées d’un de ces châles en cachemire alors très en vogue auprès des élégantes.

    Au centre, une belle table en chêne dont le plateau et les pieds étaient sculptés de créatures marines semblait avoir été dressée pour nous. Sur une nappe de lin écru nous attendaient quelques terrines odorantes, du pain frais, de beaux fromages bien crémeux et des pichets de vin.

    D’un geste de seigneur, le « Polyte » nous invita à nous asseoir  puis il chuchota quelque chose à l’oreille de notre infortuné compagnon. Ce dernier acquiesça de la tête, visiblement soulagé. Il lui avait probablement proposé de se changer avant de partager avec nous cette plantureuse collation. C’est alors qu’une petite voix se mit à me chanter une sinistre comptine qui raconte comment tous les convives d’un repas disparaissent, attirés à tour de rôle hors de la maison par un hôte qui veut les dépouiller. Décidément il fallait que je me calme, que je m’assoie, que je me restaure sans plus penser à toutes ces fables horribles qui me gâtaient l’esprit. Pourtant le « Polyte » demanda bientôt si quelqu’un pouvait aller prêter main forte au cocher car une des roues avait été endommagée pendant le voyage. Un grand paysan au dos large se leva sans se faire prier et sortit après avoir enfourné une épaisse tranche de pâté.

    Nous étions huit et nous n’étions plus que six. Quel serait le suivant ? J’en étais sûr maintenant. Tout ce luxe discret dans une aussi pauvre masure ne pouvait signifier qu’une seule chose : le cocher nous avait emmenés dans le repaire d’une bande de brigands dans le seul but de nous détrousser en nous éliminant les uns après les autres. Autour de moi, les cinq autres continuaient pourtant à ripailler sans se soucier de leurs deux compagnons qui n’étaient pas revenus. Comment les alerter ? C’était peine perdue, je savais qu’après l’aventure de cette nuit, ils me riraient au nez !

    C’est alors qu’entra un très bel enfant blond d’une douzaine d’années qu’on eût dit sorti tout droit d’un tableau de Greuze. Il ôta son chapeau pour nous saluer de façon fort élégante et le geste qu’il fit en soulevant son bras découvrit un instant sa gorge où j’entrevis dans un éclair la statuette de l’Archange que j’avais égarée. Ainsi, le sac de notre coche avait-il déjà commencé. Combien étaient-ils dehors et comment allions nous finir ?

    Sans plus se préoccuper de nous, le garçon sortit de sa veste un journal que je reconnus aussitôt puis il alla s’asseoir près de la vieille femme qu’il réveilla doucement. Quand elle l’aperçut, ses yeux pétillèrent de joie. Elle se frotta les mains avec gourmandise tout en se redressant dans son fauteuil. Le garçon ouvrit la Gazette et se mit à lui lire ma dernière chronique, celle qui racontait comment ayant passé la nuit dans le cimetière de Saint-Martin-des-Champs, j’y avais rencontré le fantôme d’ un prêtre mort depuis plus de cent ans et qui m’avait demandé de servir la messe dans une petite chapelle où il était condamné à revenir tous les ans pour espérer enfin gagner les cieux.

    Pendant qu’il lisait, mon cerveau enfiévré qui brassait en tous sens une foule de projets délirants, se recentra soudain et  me souffla enfin une idée. Peut-être était-ce la proximité de ma statuette porte-bonheur qui me rendait à nouveau inventif. J’attendis la fin de l’histoire pour m’approcher calmement de la cheminée puis je m’adressai à la vieille femme d’un air enjoué :

    -         Je vois que vous aimez mes histoires grand-mère !

    -         Vos histoires ? s’étonna le garçon.

    -         Mais oui jeune homme, mes histoires,  car vous avez devant vous le très célèbre Aristide Maupin dis-je en bombant le torse.

    -         Et tout ce que vous racontez dans la Gazette est vrai ?

    -         Et pardi mon garçon, bien sûr que c’est vrai.

    -         Mais pourquoi est-ce que moi, je n’ai jamais rencontré aucune de ces créatures  que vous décrivez. Je parcours pourtant la campagne et les bois en tous sens et tout autant que vous.

    -         Peut-être es-tu trop jeune et peut-être que tu ne sais pas leur parler. Vois-tu, il faut les mettre en confiance, connaître les bonnes formules, les endroits qui leur conviennent, leurs habitudes aussi.

    L’enfant était songeur. Je venais d’appâter le poisson, il me fallait maintenant le ferrer en avançant un autre pion.

    -         Mais dis-moi tentais-je en voyant que l’aïeule s’était rendormie, ta grand-mère a bien dû te conter quelques histoires qui se seraient passées dans les environs. Si je les connaissais, je pourrais te donner quelques conseils !

     

    à suivre...


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